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Camionneuse – Un métier? Une passion!

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Chaque année, au mois de mars, Transport Magazine aborde un aspect de la présence des femmes dans l’industrie du camionnage. Cette année, alors que Camo-route travaille à un projet pour faire passer de 3 à 10% le nombre de femmes au volant de camions, nous avons décidé de parler à des femmes qui ont choisi la route comme métier.

Nous vous présentons donc cinq témoignages bien différents, des femmes qui vivent sur et pour la route. Des témoignages qui mènent à trois constats : premièrement, les camionneuses sont aujourd’hui présentes dans pratiquement tous les types de transport. Deuxièmement, les rares critiques ou commentaires négatifs ressemblent beaucoup à ce qu’on pourrait entendre de leurs collègues masculins. Et troisièmement, qu’on s’appelle Simon ou Chantale, le camion, c’est d’abord et avant tout une passion.

(Note de l’auteur : je tiens à remercier toutes celles qui ont répondu positivement à l’appel lancé sur Facebook pour recueillir des témoignages. Vous étiez trop nombreuses pour que je puisse toutes vous parler. Il aurait fallu que j’écrive un roman, au lieu d’un simple article! Merci encore.)

Marie-France

Originaire de la rive-sud de Québec, Marie-France conduit pour un transporteur connu de l’Estrie. À 27 ans, elle a déjà trois ans de métier. Père informaticien, mère infirmière, rien de pouvait laisser présager qu’elle choisirait le camionnage.

« C’est un ami qui m’a invité à monter dans un camion et à l’essayer dans une cour privée. J’ai trippé comme un enfant à Noël. »

Comme plusieurs jeunes aujourd’hui, elle a alors suivi sa formation au CFTC.

« J’ai aimé ça, j’ai eu des bons profs et ça donne une bonne base, même si on apprend plus sur le tas. Si c’était à recommencer, je le referais, sans hésiter. Et j’étais traitée comme tous les autres, même si je suis une fille. »

Marie-France dit avoir mis une bonne année avant de se sentir pleinement à l’aise et d’arrêter de s’en faire quand elle arrivait dans la cour des clients. Sa compagnie fait principalement du transport aux États-Unis. Et pour elle, c’est le match parfait.

« J’ai commencé directement sur le US, le Canada, ça ne m’intéressait pas. J’avais envie de voyager. J’aime la liberté de mon horaire, prendre des pauses quand j’en ai envie, voir des paysages, partir à l’aventure. J’ai essayé le team et ce n’est pas fait pour moi. »

Quand on lui demande si elle se sent bien acceptée comme femme dans l’industrie, elle répond sans hésitation que oui.

« Tant avec les patrons que les collègues de travail, je me sens comme « leur chum de gars. Généralement, si tu as besoin de quelque chose, ils vont être trois à venir t’aider. Je n’ai rien vécu de négatif du fait que je sois une fille au volant. »

Des reproches à faire, des critiques ou des choses qui pourraient être améliorées pour que plus de femmes choisissent ce métier?

« Honnêtement, il n’y a rien qui ne me vient en tête. C’est sûr que nos haltes routières au Québec laissent à désirer. Je ne peux pas vraiment aller « pisser sur le tire », dit-elle en partant à rire.

Et si une amie qui s’intéresse au métier de camionneuse lui demandait des conseils, lui dirait simplement ceci.

« On n’a rien qu’une vie, pourquoi pas? »

Emmanuelle

Si vous cherchez quelqu’un qui n’a vraiment pas le look de d’emploi, c’est Emmanuelle. 5 pieds un pouce, 95 livres, sportive, difficile à croire que cette jeune Française d’origine fait le métier qu’elle fait. Elle est pourtant au volant d’un tracteur depuis deux ans et fait principalement du transport en remorque fermée dans la région de Montréal.

Son grand défi et sa grande fierté, la marche arrière

« Au début, je n’étais pas capable, j’angoissais, je n’arrivais pas à reculer. C’était ma bête noire. Aujourd’hui, c’est ma fierté. Je suis rendue une pro. »

Elle admet qu’à son poids et sa grandeur, le travail de camionneuse n’est pas toujours facile.

« Les camions ne sont pas trop adaptés pour des filles de ma grandeur. J’ai parfois besoin d’aide pour fermer et ouvrir les portes d’une remorque et ce n’est pas parce que je suis une princesse. Je sais ce que je suis capable de faire et ce que je ne suis pas capable de faire et quand je ne suis pas capable, il y a tout le temps quelqu’un pour m’aider. »

Quand on lui demande ce que doit faire l’industrie pour mieux recruter des femmes, sa réponse correspond au fond aux principes même de l’intégration en milieu de travail.

« Nous faire sentir incluse et pas nous faire sentir qu’on est des femmes. On peut faire la job comme tout le monde. On est très sécuritaire et on offre un bon service à la clientèle. Il ne faut surtout pas nous prendre avec des pincettes, nous donner des passe-droits. »

Emmanuelle se sent respecter à son travail où ses patrons acceptent qu’elle ne fasse pas plus de 50 heures par semaine.

« Ça ne m’intéressait pas de faire 60 à 70 heures par semaine. Sauf bien sûr si je vais faire du US, là, c’est différent. Mais en ville, je trouve que 50 heures, c’est très raisonnable, c’est agréable et ça me permet d’avoir une vie personnelle, une vie sociale. »

Ce qu’elle dit si une femme lui demande si ce métier est fait pour elle?

« Fonce! Regarde ma shape. Si je suis capable de faire la job, t’es capable toi aussi et tu ne le regretteras pas. »

Annick

Changer de carrière à 40 ans, Annick n’est pas la première à le faire. Mais passer d’une garderie en milieu familiale à un poids lourd dans la livraison alimentaire pour une grande chaine, c’est tout un changement!

« Initialement, je pensais à chauffeur d’autobus, c’est quelque chose qui m’avait souvent intéressé. Mais j’avais l’impression qu’il manquait quelque chose à cette idée. Et je me suis dit, tant qu’à aller chercher mon permis pour autobus, je vais aller chercher ma classe 1. Et quand je suis arrivée au CFTR, j’ai vraiment trouvé ce que je voulais. »

Annick a adoré sa formation et aurait même souhaité en apprendre plus, avoir plus de temps sur la route. Elle travaille sur la route depuis maintenant deux ans et ne regrette vraiment pas sa décision.

« À tous les matins, je rentre au travail en souriant. C’est moins payant que la garderie, mais combien plus gratifiant. Je roule avec le sourire aux lèvres, je chante, j’adore ça. »

Mère de trois enfants de 10 à 17 ans, elle admet que l’adaptation n’a pas été facile, surtout pour le plus jeune. Mais ses patrons, dit-elle, comprennent très bien qu’ils doivent aujourd’hui tenir compte de la situation familiale des chauffeurs et sont flexibles lorsqu’un pépin arrive.

« Dans le milieu où je suis, je peux adapter mes horaires. Si j’ai un rendez-vous chez le médecin le matin, je peux demander à entrer plus tard. Ce n’est pas partout comme ça par contre. »

Elle apprécie aussi l’attitude de ses collègues qui acceptent de plus en plus la présence des femmes au volant.

« De ce que j’ai pu constater, les hommes apprécient avoir des collègues féminines. Ils sont toujours prêts à aider, à donner des conseils. Il n’y a pas de malaise ou de mauvaises blagues cheap. Je n’ai pas vécu ça encore. »

Son seul reproche est à l’endroit du public en général, qui a souvent une mauvaise opinion des camionneurs.

« Il faut que ça change, cette mentalité de parler des « maudits camions » sur la route. »

Roxane

La fameuse route 389 entre Baie-Comeau et Fermont vous fait peur? C’est pourtant la réalité presque quotidienne de notre plus jeune camionneuse. En fait, c’est même grâce à elle si vous pouvez prendre la 389 en toute sécurité en hiver, puisque du haut de son 5 pieds et quart, à 24 ans, Roxane conduit un chasse-neige!

Elle a fait sa formation au CFTC, mais le camion, elle avait déjà ça dans le sang, puisque son père avait une compagnie de transport sur la Côte-Nord.

« Ça m’a toujours attiré les camions. Et ça faisait longtemps que j’y pensais, mais je n’avais pas confiance en moi. Mon père m’a dit : Essaie-le et si tu n’aimes pas ça, au moins tu vas l’avoir fait. »

Et elle a aimé ça! Même si elle a trouvé la formation difficile, en raison de son déficit d’attention, elle ne regrette vraiment pas son choix.

« J’adore ça, j’en mangerais. Il y a des jours où ce n’est pas facile, comme n’importe quel métier. J’ai toujours hâte quand l’hiver arrive. Ce que j’aime, c’est la solitude dans mon camion. Être mon propre boss sur la route. J’aime beaucoup le bois aussi. Et sur la route, c’est comme une famille. »

Oui, elle a eu quelques commentaires déplacés de la part de quelques hommes, style « Retourne à tes chaudrons »! Mais de façon générale, elle se sent bien acceptée dans ce qu’elle fait.

« Au travail, tout le monde est très respectueux avec moi et je ne manque pas d’aide. Ils savent que je ne suis pas capable de tout faire. Mais c’est vrai pour les hommes aussi; ce n’est pas juste les femmes qui ont besoin d’aide. »

Yanne

À 37 ans, Yanne a déjà 17 ans de métier. Et plus truckeuse que ça, tu meures! C’est son père, lui-même camionneur, qui lui a transmis la passion des camions.

« Il venait me chercher en camion à l’école et c’était la guerre pour me débarquer.

J’ai toujours su que c’est ce que je voulais faire. Quand j’étais petite, je disais à mon père : « un jour, je vais avoir toutes mes classes sur mon permis. Et c’est ce que j’ai fait! »

Yanne a fait son DEP en conduite de camion lourd au privé et a même dû emprunter pour défrayer ses cours. Et elle admet qu’au début, ça n’a pas été facile.

« Quand j’ai commencé, c’était pas mal plus difficile qu’aujourd’hui pour les femmes. J’ai été obligée de passer par une agence pour finalement avoir mon premier emploi et aller chercher de l’expérience. Les premières années, ç’a été difficile. Je devais toujours prouver que j’étais capable. »

Depuis, elle a à peu près tout fait. Aujourd’hui, elle a son propre camion, un Peterbilt 2005 avec un moteur Caterpillar. Et quand elle n’est pas sur les routes du Maine, elle aide son conjoint, lui aussi camionneur, pour le transport du bois. C’est l’achat de son camion l’an dernier qui a ravivé la passion qui s’était un peu éteinte.

Mère de quatre enfants, elle a connu l’époque où les patrons étaient moins ouverts à cette situation.

« Quand j’ai eu mon premier garçon, il y a 10 ans et que je demandais quelques heures pour un rendez-vous chez le pédiatre, je me faisais dire « Ben là, t’es sur un truck, Yanne ». Et aujourd’hui, c’est complètement différent, il n’y a pas de problème. Ils ont tellement de difficulté à avoir des chauffeurs qu’il a fallu qu’ils s’adaptent à cette nouvelle réalité. La pénurie de main-d’œuvre a vraiment entrainé ces changements. »

Après 17 ans de métier, Yanne reste une passionnée des camions. Et si une autre femme lui demande des conseils, sa réponse est claire.

« Si c’est une passion, lance-toi à fond. Aujourd’hui, elles ont le choix de faire ce qu’elles veulent, de choisir leur genre de camion, le type de voyages qu’elles veulent faire. C’est un très beau métier. »

Par Claude Boucher

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