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Effondrement du pont de Baltimore – Des impacts à court et long terme

Le porte-conteneur Dali encastré dans la pile du pont Francis Scott Key qui s'est effondré le 26 mars. Crédit photo: Wikipedia - U.S. Army Corps of Engineers

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La destruction totale du pont Francis Scott Key par le porte-conteneur Dali le 26 mars créera de nombreux maux de tête aux expéditeurs, armateurs de navires, transporteurs routiers et à toute la chaîne logistique de la côte est des États-Unis et de l’est du Canada. Non seulement le transport routier sera affecté directement par la disparition de cet important pont, mais toutes les activités du port de Baltimore, l’un des plus importants ports de conteneur de la côte est des États-Unis, s’en trouvent bouleversées.

Le pont Francis Scott Key, inauguré en 1977 et nommé en l’honneur de l’auteur de l’hymne national américain, était une pièce importante du réseau de transport routier sur toute la côte est américaine. L’une des quatre options pour les trajets nord-sud le long de l’axe routier principal entre la Floride et le Maine, la I-95, le pont était emprunté par plus de 30 000 véhicules par jour. C’est peu, comparativement aux 130 000 véhicules qui traversent quotidiennement le pont Samuel-De-Champlain entre Montréal et la Rive-Sud, mais lorsqu’on tient compte du fait que les deux autres voies rapides pour traverser Baltimore, la I-95 et la I-895, sont des tunnels où le transport surdimensionné ou de matières dangereuses est interdit, l’impact de la disparition de cet axe routier est majeur.

Le Département des transports du Maryland a d’ailleurs annoncé que le transport de marchandises serait détourné sur la I-95 et la I-895, ou dans le cas de matières prohibées dans les tunnels, la section nord-ouest de la I-695. Or, ces trois axes routiers étaient déjà régulièrement encombrés. L’ajout de 30 000 véhicules additionnels, même réparti sur les trois autres routes, aura inévitablement des impacts sur la fluidité de la circulation.

Transport maritime

Au-delà de l’axe routier important que représentait le pont Francis Scott Key, son effondrement vient perturber les opérations du port de Baltimore. Ce port est la porte d’entrée de plus d’un million de conteneurs équivalents 20 pieds (EVP) annuellement. En 2023, Baltimore est le port où ont transité le plus de véhicules, soit 847 158 automobiles et véhicules légers, de tous les ports américains, en plus d’être premier pour l’équipement agricole et de construction. Il était aussi deuxième pour les exportations de charbon. Si d’autres ports, comme celui de New York-New Jersey, reçoivent plus de marchandises conteneurisées, l’arrêt, même temporaire, aura de sérieuses répercussions à l’échelle régionale, nationale et internationale.

Claude Comtois est professeur de géographie à l’Université de Montréal et chercheur affilié au Centre de recherche sur les Réseaux d’Entreprise, la Logistique et le Transport de l’Université de Montréal (CIRRELT). Son enseignement et ses recherches portent sur les systèmes de transport, notamment le transport maritime et les ports. Selon lui, l’impact de l’effondrement du pont de Baltimore est multiple.

« D’abord, le port de Baltimore est un important port de manutention de conteneur. Et c’est aussi un des principaux ports rouliers de l’est des États-Unis, où transitent de nombreux véhicules importés et exportés. Ils n’auront plus accès à ça, et ça aura de gros impacts sur plusieurs chaînes d’approvisionnement, notamment pour les véhicules agricoles. Oui, les navires peuvent être redirigés vers d’autres ports comme Philadelphie ou New York, sauf qu’ils n’ont pas réservé leur place dans ces ports. Ce n’est donc pas vrai qu’un navire peut partir de Baltimore et aller à New York, car rien n’assure que New York aura les quais, les équipements et le personnel pour accueillir ce navire. Est-ce que ces ports vont être ouverts 24 heures sur 24, est-ce que les ports ont des ententes avec les débardeurs? C’est un gros dossier. »

De nombreux navires risquent selon lui de devoir attendre plusieurs jours le long de la côte est pour trouver une place où décharger ou charger sa marchandise, ce qui entrainera des coûts additionnels.

Claude Comtois souligne aussi tous les impacts sur le transport routier, non seulement par la disparition de cet important axe routier, mais aussi justement par le changement de destination et donc de lieu de déchargement des navires.

« C’est multiple comme impact. Ça va prendre plusieurs mois avant de réorganiser tout ça. Pour l’exportation, la marchandise qui était en attente au port de Baltimore va devoir être remise sur des camions ou des trains, pour la réacheminer vers d’autres ports. »

C’est donc toute la logistique liée aux ports de la côte-est américaine qui doit être revue. Les transporteurs routiers habitués à livrer ou prendre livraison au port de Baltimore devront revoir leurs opérations, tisser des liens et des contacts avec les autorités portuaires d’autres ports, et refaire leurs routes.

En raison de l’effondrement du pont, six navires commerciaux sont d’ailleurs coincés dans le port de Baltimore, attendant que la voie maritime soit rouverte, et une trentaine de navires s’apprêtaient à y entrer. Le secrétaire aux transports Pete Buttigieg ne s’est pas avancé pour l’instant sur une date de réouverture du port. « Il est trop tôt pour se risquer à une prévision », a-t-il dit lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche. « La plus grande partie du port se trouve à l’intérieur du pont, et ne peut donc pas fonctionner. »

Il a conclu en soulignant que la réouverture du port sera plus rapide, évidemment, que la reconstruction du pont.

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